LA FRANCE AIME LE NUCLEAIRE ET LES FRANCAIS ?
Nul n’ignore que la France, avec ses 56 réacteurs répartis sur 18 sites, est le pays le plus nucléarisé au monde et le deuxième parc mondial en puissance électrique.
Alors pour commencer ce petit tour de table des positions de chacun, regardons d’abord une photo de marguerites prise à Fukushima en 2015, quatre ans après l’accident nucléaire.
Même si elles sont un peu curieuses, elles vont cependant nous permettre, en les effeuillant, de jouer à “ je t’aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout.
UN PEU
L’opinion sur l’énergie nucléaire des français s’est, dans une certaine mesure, modifiée en raison de l’augmentation du tarif des énergies fossiles et des dégâts environnementaux et climatiques causés par celles-ci. Ainsi certains écologistes, comme Yann Arthus-Bertrand ou Pascal Canfin, ne diabolisent plus l’utilisation de l’atome.
Les énergies renouvelables pourraient en effet ne plus arriver à couvrir l’augmentation de la consommation électrique dans les années à venir. De plus pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050, à savoir ne pas émettre plus de CO2 que la planète peut en absorber, il ne faudra plus dépendre des énergies fossiles.
Et puis il semble bien que vu la longue cohabitation des français avec le nucléaire, pour certains plus proche que d’autres, ceux-ci se sont peu à peu habitués à cette forme d’énergie.
BEAUCOUP, PASSIONNEMENT, A LA FOLIE
Nos hommes politiques aiment le nucléaire. Depuis les maires des communes où sont installées les centrales et qui ont bénéficié d’une manne financière jusqu’aux dirigeants qui ont soutenu la filière. Citons Pierre Messmer, premier ministre de Georges Pompidou, à l’origine du lancement d’un vaste programme de REP, réacteur à eau pressurisée.
Au nom tout d’abord du prestige de la France, vieille idée un peu moins mise en avant maintenant.
Au nom de la création d’emplois : 222000 personnes travaillent dans la filière nucléaire et la construction “ prévue “ de six nouveaux EPR permettraient de générer 14000 à 30000 nouveaux emplois.
Au nom de la lutte contre le CO2 en essayant de faire approuver par Bruxelles l’idée que l’énergie nucléaire serait une activité verte, contribuant à l’évolution positive du climat alignée sur la “ taxonomie verte “.
Au nom de l’excellence industrielle française pouvant ouvrir de nouveaux marchés.
Au nom de la survie d’EDF qui malgré une dette de 40 milliards d’euros pense retrouver des commandes à l’exportation en raison d’une crédibilité retrouvée. La branche publicité d’EDF s’est d’ailleurs immédiatement emparé de l’atout énergie verte.
Des associations de plus en plus en plus audibles se font aussi le chantre de l’énergie nucléaire comme “ Patrimoine Nucléaire et Climat “ , “Cérémé “ ou les “ Voix du nucléaire “. Enchaînant tribunes dans la presse ou squattant les réseaux sociaux, de jeunes vulgarisateurs vantent une électricité verte et moins chère. De nouvelles start-up, Naarea en tête, travaillent sur de nouveaux genres de réacteur.
PAS DU TOUT
LA VIE D’UNE CENTRALE
Sa construction tout d’abord. Chaque réacteur coûte environ deux milliards d’euros ce qui place le coût du parc nucléaire français dans une fourchette allant de 96 milliards au double. Les chiffres sont très variables suivant ce que l’on prend en compte et les sources d’information.
Son combustible. L’uranium qui alimente nos centrales est fourni en grande partie par le Niger et le Kazakhstan. Peut-on parler d’indépendance énergétique quand l’approvisionnement provient de pays dont la situation peut devenir sensible même s’il existe des gisements d’uranium dans d’autres régions du monde.
L’âge des centrales. Elles entrent pour la plupart dans leur troisième ou quatrième âge. Le plus jeune réacteur a déjà 19 ans et les plus vieux plus de 40. Porter leur fin de vie à 60 ans est un pari risqué et coûteux. Leur entretien confié à des sous-traitants ne bénéficient plus des savoirs des premiers travailleurs de l’entreprise et le risque d’un accident majeur n’est pas à écarter. Les images de Tchernobyl et Fukushima sont encore bien présentes dans toutes les têtes.
Les déchets radioactifs, soit environ deux kilos par an et par habitant. La piscine de La Hague va probablement arriver à saturation en 2028. Quant à l’enfouissement, on connaît les difficultés de l’ANDRA et de son site de Bure pour convaincre la population et ses détracteurs. En effet quel héritage va-t-on laisser aux générations futures avec des déchets d’une durée de vie de 100000 à plusieurs millions d’années ?
Le démantèlement. Douze réacteurs sont en cours de démantèlement mais il faudra encore une quinzaine d‘années minimum pour y parvenir. Si l’on prend pour exemple la centrale de Brennilis qui ne sera complètement démantelée qu’ en 2030, soit après trente ans de travaux ,on peut se poser des questions. Heureusement le chantier du réacteur de Chooz A sera bientôt achevé après… quatorze ans de travaux.
Et pour les usagers, le prix de l’électricité. Pour l’instant celui-ci est assez bas ou moyennement élevé mais qu’en sera-t-il dans les années à venir compte tenu des éléments qu’il faudra considérer ou reconsidérer ?