DES CHIFFRES ET DES LETTRES
Quand il faut respecter l’étiquette
Dans les magasins, sur les voitures, sur le Net, et sur toutes formes de diagnostic, on les voit se développer partout, ces étiquettes qui alignent lettres ou chiffres. Nutri-score, Eco score, Planet-score, pour les produits alimentaires; indice de réparabilité, indice de durabilité à venir en 2024 pour l'électroménager; Crit' Air pour les voitures, le DPE pour les logements et un éco-score à venir dans le domaine du textile. Bien sûr ces informations données sur les produits par ces petits logos peuvent se révéler fort utiles pour permettre aux consommateurs de mieux manger ou de lutter contre le gaspillage. Il est d'ailleurs significatif de constater que le Nutri-score est loin d'avoir fait l'unanimité dans les grandes multinationales alimentaires, comme Coca- Cola ou Unilever, et chez d'autres détracteurs qui cultivent le nutriscepticisme pour mieux écouler des produits à la valeur nutritionnelle douteuse. Mais certaines de ces étiquettes peuvent être perçues comme l'émanation d'une écologie punitive. Si, le propriétaire d'un logement ,classé G, se retrouve en même temps avec un véhicule, classé 5, par Crit' Air, il peut avoir l'impression d'une double peine au cas où, malgré les primes, il ne pourrait satisfaire aux exigences environnementales.
L’ère de la notation permanente
Tout a débuté en 1995 sur le Net, avec Amazon qui a proposé à ses clients de noter les produits commandés. Puis TripAdvisor a suivi en 2000 en conviant les siens à évaluer les hôtels et restaurants fréquentés. Cette pratique s'est vite répandue pour devenir monnaie courante. Des produits, nous sommes passés aux individus. Du médecin au livreur, du chauffeur ou du client Blablacar au propriétaire d'un hébergement Airbnb, bref de prestataires en prestataires, peu nombreux sont ceux qui échappent maintenant à ces diverses notations et appréciations. Certains même les recherchent pour mettre en avant leur entreprise. Le problème c'est parfois la fiabilité de l'appréciation envoyée sous le coup d'une émotion, positive ou négative. Et puis tout ne peut pas être jugé à l'aune de sa propre personne. Plus grave encore, lorsque les employeurs se servent de ces notations pour apprécier le travail de leurs employés sur lesquels ils font pression pour qu'ils obtiennent de bonnes notes.
Dans un pays qui a si peu de respect pour ses enseignants cette manie de tout noter est assez étonnante. Serait-ce l'expression de la nostalgie d'un passé scolaire embelli où l'on attendait avec une certaine angoisse le bulletin trimestriel ou au contraire, pour d'autres, l'expression d' une vengeance en rapport avec des souvenirs scolaires douloureux ?Ou encore une façon d'évacuer ces experts parfois si détestés et de leur montrer que l'on n'a que faire de leurs jugements.